
Paru aux éditions Le Cherche Midi – 2015 – 499 pages
« Jeunes quarantenaires », Clover, Addison, Mia et Jane sont des amies de longue date : elles partageaient un appartement sur le campus d’Harvard pendant leurs études. Vingt ans plus tard, elles sont conviées à la réunion des anciens élèves. Ce week-end teinté de nostalgie les invite à réfléchir sur leur vie, ce qu’elles ont accompli ou non, ce qu’elles regrettent, ce qu’elles aimeraient encore faire. Entre leurs espoirs d’alors et les réalités d’aujourd’hui, leur existence a pris un tour inattendu. Cette réunion est aussi l’occasion pour elles de revoir leurs anciens camarades de promotion, qu’elles n’ont jamais vraiment perdus de vue. En effet, tous les cinq ans, les anciens diplômés d’Harvard doivent remplir le livre d’or, dans lequel chacun est tenu d’écrire un court essai sur sa vie, sa famille et ses projets. Mais, entre l’image que l’on veut montrer au monde et la vérité, il y a parfois une nette différence : c’est ce que découvriront les quatre amies au cours de ces quelques jours qui vont bouleverser la vie de chacune d’entre elles.
Pour tout avouer, j’ai craqué sur la couverture de ce livre avant même d’en connaître le contenu. Rien que la phrase d’accroche de la couverture me plaisait « Avant Facebook, il y avait… » C’est marrant car ce livre est tombé pile poile dans ma phase « réflexion » sur les réseaux sociaux et ce qu’on y montre. Il est impressionnant de voir à quel point nos « amis » sur les réseaux ou même des inconnus sur la toile peuvent nous faire croire qu’ils ont une vie de rêve. On se base sur leurs photos, hautement mises en scènes et sur leurs « récits » qui nous font rêver. Mais au fond, si on creuse, si on gratte la jolie couverture dorée dont se parent leurs statuts et photos on se rend compte qu’ils sont bien souvent comme nous. A avancer dans la vie comme ils peuvent, à chercher leur place, à profiter des petits moments de bonheur que la vie leur apporte mais qu’ils sont eux aussi soumis à la pression extérieure et sociale et que tout n’est pas rose. Nous nous rendons compte qu’il est très facile d’enjoliver la vérité et de devenir quelqu’un d’autre sur les réseaux sociaux, que nous pouvons projeter de nous l’image qui nous plait.
Le livre d’or, c’est un peu cela. Tous les 5 ans les anciens diplômés doivent écrire un texte de quelques paragraphes sur leur vie actuelle. A eux de jouer franc jeu ou d’enjoliver la vérité. Qui a envie de dire qu’il a une vie « pourrie » alors que les autres ont réussi ? Chacun se cache derrière des mensonges et l’illusion de la vie rêvée. Quand ces personnages se rencontrent à l’occasion de la fête de leur promo, certains vérités se dévoilent et les mensonges volent en éclat mettant à mal les croyances et illusions.
Même s’il faut un peu de temps pour rentrer dans l’histoire, c’est un livre formidable que nous livre ici l’auteure. Le temps d’un week-end nous avons l’impression de cohabiter avec ces femmes qui se sont connues à la faculté et qui se retrouvent avec leurs familles. Très soudées, elles vont aussi être confrontées à d’anciens camarades, et voir ce qu’ils sont devenus. Alors que certains semblent mener une existence de rêve et prestigieuse, il apparaît évident que pour d’autre c’est plus compliqué. C’est un véritable tableau social américain qui nous est dressé et c’est captivant. Les personnages sont attachants, ayant tous une personnalité marquée et différente et des vies bien souvent très éloignées de ce dont elles rêvaient lors de leurs études ou de ce qu’elles ont pu écrire dans le livre d’or.
Le roman n’a rien d’ennuyeux et nous entraîne, le temps de ce week end de retrouvailles sur des routes sinueuses et des péripéties incroyables, parfois dramatiques. Prison, crise d’adolescence, retrouvailles avec un ex etc…Mia, Clover, Jane et Addison vont, le temps d’un week end comprendre énormément de choses et remettre en question tout leur quotidien et les acquis. Apprendre à aimer, à s’accepter, à pardonner, à avancer, il n’est jamais trop tard. Certaines vont se rendre compte du poids de leur vie et vont tout faire pour réparer les erreurs. D’autres vont admettre avoir fait fausse route, alors que d’autres assument ce qu’elles sont. Leurs familles viennent apporter un sacré dynamisme, entre enfants et maris, certains situations sont alors cocasses. Nous voyons rapidement qui a été honnête dans son livre d’or et qui a tenté d’améliorer son image. Mais la vérité ne saurait se dissimuler à ses vrais amis et le but de chacun va d’être d’éclairer l’autre pour qu’enfin il trouve sa place et le bonheur qui lui est dû.
Il est difficile d’en dire plus sans « spoiler » les péripéties, découvertes et personnalités de chacun et cela serait vraiment dommage. L’auteure a sur créer des femmes fortes et captivantes qui vont se battre pour leur vie, leur destin. Des femmes en quête de vérité, d’authenticité. Nous les suivons avec délectation dans chacune de leurs aventures, passant par la joie, les émois, les larmes, les humiliations, les révélations et l’acceptation de soi. Une véritable aventure humaine, une amitié hors du temps et un week end exaltant. Le temps de leurs retrouvailles, nous quarantenaires replongent avec nostalgie dans leurs années universitaires et analysent leur parcours, leurs vies. Une plume acerbe, franche et pourvue également d’humour qui rend ce roman addictif et marquant, nous entraînant à la réflexion sur nos propres existences et ce que l’on en montre au monde extérieur. Les apparences sont bien souvent trompeuses mais la vérité n’est pas toujours le meilleur chemin à prendre.

Un roman qui peut paraître d’emblée banal, mais il n’en est rien. A l’occasion d’une réunion d’anciens universitaires les masques tombent, les secrets se dévoilent et les révélations font mal. Un week end qui permettra à ces quarantenaires de reprendre leur vie en main et d’opérer les changements nécessaires à leur bonheur et de se diriger vers l’authenticité. Une très belle aventure humaine et une amitié entre 4 femmes qui fait envie.

16/20

« Mais tu sais aussi bien que moi qu’on peut soigner la frigidité féminine, et qu’on ne divorce pas d’un mari parfaitement acceptable bien qu’un peu distant d’un point de vue affectif simplement parce qu’une meilleure version plus passionnée et plus compatible vient de faire son apparition. Les gens ne sont pas des voitures qu’on échange à loisir pour un nouveau modèle. Ce sont des personnes, avec une vie émotionnelle intérieure complexe, des liens filiaux, et une psyché qui n’est que trop aisément écorchée. »
« Jane embrasse du regard toute cette agitation, ce qu’elle voit et ce qu’elle ne peut qu’imaginer, et se sent submergée par cette folie. qu’est-ce que cela signifie, toutes ces minuscules actions, tous ces secrets tus, tous ces humains fragiles qui, à travers les épreuves, les amitiés et les coucheries, tentent de survivre à cette course effrénée et épuisante contre le temps. »
« Il n’y a pas que la vérité qui compte, dit-il souvent à ses patients. La découverte de la vérité est souvent suivie de conséquences, comme beaucoup de personnalités politiques l’ont appris à leurs dépens. Les commentaires qui surgissent de nos lèvres ne méritent pas tous d’être imprimés. Les pensées qui nous traversent n’ont pas forcément besoin d’être transformées en paroles. Les doléances de chacun ne doivent pas toujours être énoncées à voix haute. Et les secrets n’exigent pas tous d’être dévoilés, en particulier si le besoin de tout révéler n’est motivé que par le désir d’expier sa culpabilité. Il a vu des mariages tout à fait solides tomber en morceaux sous le poids d’une confession superflue. Il recommande la discrétion, chaque fois qu’elle est envisageable. »
« Combien d’entre nous ici présents pouvons dire que nous vivons notre vie de manière authentique ? Combien d’entre nous sommes fidèles à nous-mêmes, à nos idéaux, fidèles à ces gamins de 18 ans qui sont entrés ici pour la première fois, la tête pleine de rêves ? Nous n’avons qu’une vie. Une seule. Et nous nous dirigeons tous vers la même fin malheureuse. Alors voilà ma question : comment comptez-vous remplir le restant de vos jours ? Comment ferez-vous pour vivre de manière authentique ? »
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