[Chronique] L’atelier des souvenirs de Anne Idoux-Thivet ou l’histoire d’un feel-good qui n’était pas pour moi.

Publié aux éditions Michel Lafon – Janvier 2018 – 344 pages
Merci à Michel Lafon pour cette lecture

Lorsqu’elle hérite de la maison de sa grand-mère dans la Meuse, Alice décide de quitter sa vie de thésarde parisienne qui ne mène nulle part et de s’installer à la campagne. Elle se lance alors dans l’animation d’ateliers d’écriture dans deux maisons de retraite. Suzanne, Germaine, Jeanne, Élisabeth, Georges, Lucien… les anciens dont elle croise la route sont tous plus attachants les uns que les autres.

Au fil des séances d’écriture, les retraités dévoilent des bribes de leur passé et s’attachent à la jeune femme, dont ils devinent la solitude. Bien décidés à lui redonner le sourire, la joyeuse bande de seniors se donne pour mission de l’aider à trouver l’amour !

UN ROMAN SENSIBLE, DRÔLE ET ÉMOUVANT.

Oh que je déteste me sentir trop en décalage avec la mouvance, avec les avis si agréables sur ce roman. Avant de partir dans l’exploration du roman, je voulais vous expliquer pourquoi j’avais choisi de le lire. Il y a des années de cela, j’étais étudiante en psychologie et j’envisageais les diverses orientations possibles de carrière. Les trois qui revenaient le plus dans mes envies étaient la criminologie, la psychologie du développement et la psychologie gériatrique et du vieillissement. On va donc se concentrer sur ce dernier point. Je pense l’avoir déjà dit ici, mais j’aimerais beaucoup, quand je serai rétablie, travailler (salariée ou bénévole) dans le domaine de l’accompagnement de fin de vie. Cela ne concerne bien entendu pas uniquement le troisième âge, mais aussi, malheureusement, des bien plus jeunes. De mon expérience, les maisons de retraite sont souvent des mouroirs, où les personnes âgées attendent la fin en passant le temps comme elles le peuvent, rythmant leur journée des repas et de l’attente éventuelle de visites. La solitude des personnes âgées est donc un sujet qui me touche énormément et à de nombreuses reprises j’ai imaginé proposer mes services pour des lectures ou ateliers d’écriture. Voilà, vous savez tout de ma motivation à lire ce roman.

J’étais persuadée que ce roman serait un délicieux cupcake, un doudou à serrer contre son cœur et c’est donc dans le train pour Paris que j’ai commencé ma lecture. Malheureusement, il m’a laissé une sensation d’indifférence cruelle et le réconfort escompté n’est jamais arrivé. Je vais bien entendu vous expliquer pourquoi plus en détail, mais peut-être ne l’ai-je pas lu au meilleur moment ? Ou peut-être que, tout simplement, l’écriture de l’auteure n’est pas faite pour m’atteindre, moi. Sachez que c’est un roman qui se lit très facilement et qui reste touchant. Si je l’ai trouvé bien plat et trop décousu dans l’ensemble, ce n’est pas pour autant que je l’ai jugé mauvais ou que je l’ai abandonné. J’ai vraiment du mal à mettre des mots aujourd’hui sur mon ressenti, tiraillée que je suis entre Alice et ses petits-vieux de la maison de retraite.

Car oui, mon principal souci vient d’Alice. J’ai totalement bloqué sur ce personnage que j’ai trouvé fade, insipide et presque désespérant. Je n’ai pas vraiment eu l’impression qu’elle était vivante, plutôt un fantôme errant d’atelier en atelier et se laissant guider par le bon vouloir des résidents des maisons de retraite ou par les écoliers qu’elle aura aussi plus tard. Alice a tout de la vieille fille, célibataire depuis toujours, elle a fait ses études et après plus rien. Elle n’a pas de motivations réelles et ne nous en donne pas. Heureusement, nous sommes directement plongés dans les deux maisons de retraite du coin et là au moins nous avons des personnalités diverses et affirmées. Car pour moi, si Alice incarne le personnage principal, elle ne sera finalement qu’un prétexte à donner vie à des témoignages, des histoires bouleversantes et un nouveau sens au temps restant aux adorables personnes âgées que l’on rencontre. La plus grincheuse d’entre eux, Germaine, nous fera passer par de nombreuses émotions et nous apprécions ici les caractères entiers. Nous aurons aussi le cœur serré face à certains destins, certaines maladies (Alzheimer) ou certaines solitudes. Pour cette partie-là, j’ai aimé le roman. En effet, chaque personnage écrit son petit texte et nous raconte une histoire, la plupart du temps tirée de leur vie réelle et c’est très touchant en soi. Quand on voit la génération présente dans les établissements, nous comprenons vite que les récits risquent de beaucoup parler de la guerre et de cette épreuve qui les a façonnés. Mais tout n’est pas négatif et nos adorables pensionnaires parviennent à tirer du positif.

Vous vous doutez bien qu’on ne va pas tenir tout un roman avec les textes de chaque personnage et qu’il doit se passer des choses en dehors des ateliers. On commence par du réaliste avec une amitié pour Alice, et du fantasme pour nos personnes âgées des deux maisons de retraite qui vont s’imaginer des choses bien drôles chacun de leur côté. Nous assisterons donc à des moments tour à tour drôles et émouvants. Malheureusement pour moi, le côté caricatural des personnages secondaires (en-dehors des personnes âgées) ne m’a absolument pas convaincu et je n’ai pas adhéré à Chloé, Julien ou encore la maire. Ces personnages m’ont paru tellement clichés et artificiels que je n’ai pas su quoi en faire dans ma lecture. Certes, ils sont caractéristiques d’un roman feel-good mais avec moi la sauce n’a pas pris. Dommage. J’aurais aimé les comprendre autrement qu’au travers des yeux des pensionnaires. D’ailleurs, même le personnel des maisons de retraite est caricatural et cliché et cela n’apporte pourtant pas, à mon sens, grand-chose à l’histoire.

Je vais maintenant m’attarder quelques instants sur la plume de l’auteure. J’avoue sans honte que je ne la connaissais absolument pas, mais j’aime sans cesse découvrir de nouveaux auteurs. Si je n’ai rien à reprocher sur la forme, c’est sur le fond que cela n’a pas fonctionné avec moi. Pourquoi ? Parce que je n’ai rien ressenti. Aucune émotion. Rien. Néanmoins, certains moments auraient pu me serrer le cœur, les histoires et les destins sont touchants de par leur essence même. Mais je n’ai rien su décoder dans les mots et les tournures et je me suis presque sentie exclue de ce qu’il se passait. J’ai trouvé que finalement le livre était assez plat et je me suis même demandé où on allait exactement. Je suis pourtant une hypersensible, alors qu’est-ce qui a cloché? Non vraiment, la plume n’était pas faite pour moi, le style n’était pas destiné à me toucher (ce qui ne m’empêchera pas de tenter de lire de futures publications de l’auteure, je ne renonce jamais aussi facilement).

Globalement, ce livre n’a pas marché avec moi pour les raisons suivantes :

  • L’héroïne est ennuyeuse au possible, elle n’a aucun contenu, c’est un personnage plat et fade
  • L’histoire laisse peu de place aux surprises, on sent tout venir à des pages à la ronde
  • Les éléments dramatiques ou au contraire joyeux sont traités avec trop de distance et je n’ai absolument rien ressenti
  • Globalement, les comparaisons au Madeleine’s project ne m’ont pas parues si pertinentes et ne venaient qu’enrichir de manière hasardeuse une quête tout aussi périlleuse
  • Le style de l’auteure n’est pas pour moi, du moins pas pour me toucher ou m’apporter la touche de feel-good nécessaire

Toutefois, si vous regardez les nombreux avis élogieux sur ce livre, vous vous rendrez peut-être compte qu’il est fait pour vous. Je vous invite à ne pas tenir compte de mon seul avis, mais vraiment de peser le pour et le contre, car encore une fois ce livre n’est pas du tout mauvais, au contraire. C’est juste que ce n’est pas du tout ce que j’en attendais. Je voulais plus de ressentis, plus de récits de vie, plus de secrets et de mystères et non des plans exposés dans les détails. Et surtout je voulais une véritable héroïne, pas forcément incarnée par un charisme quelconque, mais accessible. 

Une légère déception pour moi, mais je suis quand même contente d’avoir donné sa chance à ce livre qui contenait pourtant tout pour me plaire. La façon dont le sujet est traité ainsi que la plume plutôt atypique de l’auteure ne m’ont pas touchée, mais je reconnais avoir passé un moment agréable avec certaines pensionnaires. Toutefois, trop de clichés et de caricatures m’ont lassée et je n’ai plus vraiment eu le ressenti feel-good escompté.

Rien à ajouter de plus pour définir le choix de ma note. Cela arrive de passer à côté d’un roman. C’est vrai qu’il est rare que je sois à contre-courant des avis généraux, mais bon, une fois n’est pas coutume. 


Je vous laisse sur 3 avis, avec les liens, beaucoup plus enthousiastes pour vous faire votre opinion et décider de si, oui ou non, vous avez envie de lire ce roman :

Pour mon amie Camille du blog I believe in Pixie Dust, ce roman nous offre des personnages attendrissants et une écriture atypique.
Madame Ours du blog Dans ma liseuse hypefertile, c’est un joli premier roman.
Enfin, Newkidonthegeek a beaucoup apprécié sa lecture.

4 réflexions sur “[Chronique] L’atelier des souvenirs de Anne Idoux-Thivet ou l’histoire d’un feel-good qui n’était pas pour moi.

  1. Vampilou fait son Cinéma dit :

    Oh bah mince ma belle ! Je suis très étonnée de voir cet avis mitigé de ta part, je m’attendais également à ce que tu l’apprécies, mais je comprends aisément les points que tu mets en avant…Je pense d’ailleurs que c’est ce qui pourrait me décevoir également, alors à voir !

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  2. brindille33 dit :

    J’ai vu passer la couverture et j’en ai lu le quatrième. Le sujet est intéressant et je me demande si je n’irais pas moi-même proposer ce genre de démarche dans les Ephad, où comme tu l’exprimes si bien, des endroits bien sinistres, et dont j’en ai encore eu des échos hier via une amie Bruxelloise. Je le mettrai dans ma liste d’envie pour comparer mon impression avec la tienne. 🙂 Le temps passera, la liste sera existante, quant à mon futur passage, je procrastine et fais des sauts de puces sur les blogs ou sites. 🙂
    Je lis beaucoup et ne chronique pas. J’en ai une en attente et d’autres qui attendent sur ma page d’accueil à défaut de tous les autres que je n’ai même pas mis dans ma liste de livres à chroniquer. 🙂
    Merci pour ton avis intéressant. 🙂
    Tu sais, pas mal de personnes avait adoré le premier livre de Dan Brown. Unanimement. Personnellement j’ai détesté. 🙂 Tout cela ne veut rien dire. Une divergence de vue bien au contraire est intéressante et source du pourquoi et du comment, d’un début d’échanges qui pourraient être intéressants.

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  3. douceurdelireblog dit :

    Je viens de le lire et de poster ma chronique, j’en ai profité pour aller relire ton avis, que je partage totalement. Tu as très bien exprimé mon ressenti : ce roman est assez plat et mis à part pour les personnes âgées qui sont attendrissantes, je n’ai ressenti aucune émotion particulière face à cette lecture pourtant feel good. J’ai aussi eu beaucoup de mal à accrocher à la plume, qui me semble très distante… Bref, merci pour cette belle chronique, qui est en adéquation avec mon point de vue, mais très joliment formulée.

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