[Chronique] La Tresse de Laetitia Colombani

Publié aux éditions Grasset – mai 2017 – 224 pages
Merci à Grasset et Netgalley pour cette lecture

Trois femmes, trois vies, trois continents. Une même soif de liberté.

Inde. Smita est une Intouchable. Elle rêve de voir sa fille échapper à sa condition misérable et entrer à l’école.
Sicile. Giulia travaille dans l’atelier de son père. Lorsqu’il est victime d’un accident, elle découvre que l’entreprise familiale est ruinée.
Canada. Sarah, avocate réputée, va être promue à la tête de son cabinet quand elle apprend qu’elle est gravement malade.

Liées sans le savoir par ce qu’elles ont de plus intime et de plus singulier, Smita, Giulia et Sarah refusent le sort qui leur est destiné et décident de se battre. Vibrantes d’humanité, leurs histoires tissent une tresse d’espoir et de solidarité.

Hier, je commençais déjà à travailler sur cette chronique. Chronique, qui je l’avoue, ne me fut pas aisée à livrer. La Tresse est un roman d’une beauté brute, un joyau qui se taille au fil des pages, au fil des lignes et grâce à l’envie de liberté des femmes qu’on y rencontre. Ce matin, nous apprenions la disparition d’une grande dame, Madame Simone Veil. À 89 ans, Mme Veil laisse derrière elle un héritage puissant pour la cause féminine. La Tresse est pour moi un ouvrage féministe, mais plus généralement humaniste. Ce n’est pas un manifeste pour l’égalité hommes-femmes, mais une fiction fascinante nous entrainant à la rencontre de trois femmes à travers le monde. Hommage aux femmes et à la beauté de leur amour, La Tresse s’impose comme un roman lyrique et puissant, indispensable à lire.

Une tresse, trois brins. Trois femmes, trois vies, trois continents. Qu’est-ce qui relie ces femmes et les tresse ? La soif de liberté, de rêver, d’être une femme sans avoir à s’en justifier ou risquer sa vie. La volonté d’exister sans devoir se battre pour, celle d’avoir des droits et une légitimité. Smita, en Inde veut changer de vie et surtout offrir une éducation à sa fille pour que jamais elle n’ait à subir la même vie qu’elle. Giulia, en Italie se voit dans l’obligation de reprendre l’entreprise familiale et lui proposer un nouvel essor. Sarah, malade, souhaite garder son poste, les échelons gravis à la sueur de son front et ses sacrifices personnels et ne pas voir ses ambitions piétinées par un opportuniste. Chacune va tout donner pour s’assumer et se libérer des entraves : coutumes, traditions familiales, sexisme.

Roman plutôt court, mais intense, porté par une plume absolument magnifique, mais qui n’épargne pas, La Tresse vous invitera forcément à réfléchir sur des sujets du quotidien tout comme sur la liberté. Ces trois femmes n’ont sans doute rien en commun et ne se rencontreront jamais véritablement. Pourtant quelque chose les relie, un fil ou plutôt trois, qui se tressent au cours du récit. Alternant les trois points de vue, nous suivons un moment de vie isolé de ces femmes. Ces instants, particuliers, car dans l’épreuve nous permettent de poser un regard sur leur situation, leurs conditions de vie et sur tout ce qui détermine qui elles sont. Mais elles sont rêveuses et formidablement indépendantes. Éprises d’une soif de liberté et de rêver sans pareil, elles mettent tout en place pour offrir à leur existence le tournant qu’elle mérite. Courageuses, fières, belles, elles ne sont qu’un minuscule grain de poussière sur la planète, comme vous, comme moi. Qui sont-elles pour oser défier leur culture, leur religion, leur héritage, leurs valeurs familiales, leur monde professionnel ? À quoi s’attendent-elles à se battre dans ce qui semble être de l’air ? À se libérer et à avancer. À s’aimer, à vivre.

Trois brins de solidarité à travers le monde, un amour si puissant qu’il déploie ses ailes à travers les continents. Une volonté de fer dans des écrins de douceur et de féminité que chacune vit à sa façon. Ces femmes, liées sans jamais le savoir, vont devoir faire des sacrifices, perdre et recommencer, mais rien ne pourra plus jamais les arrêter. Smita ira jusqu’au bout pour que jamais sa fille ne vive dans une misère qu’elle ne mérite pas. Giulia fera son possible pour vivre l’amour, mais aussi sauver ce que sa famille a construit et qui lui tient à cœur. Sarah se battra contre la maladie et apprendra à se recentrer sur l’essentiel. Et les hommes dans tout cela ? Pour chacune ils n’entrent pas dans l’équation de la liberté, du moins aucune ne souhaite leur laisser un pouvoir de supériorité du genre. Alors nous, lectrices, mais j’invite aussi les lecteurs, plongeons dans des tranches d’existence, suivons leur histoire et ne résonne ainsi plus que la puissance de l’amour universel et une soif de liberté inspirante.

La Tresse s’adresse à tous, hommes et femmes et rappelle la valeur de chaque être humain. Récit poignant de trois existences, il met en perspective des différences, mais surtout une volonté commune, celle d’être libre et de vivre. Une histoire sombre et lumineuse à la fois, nous livrant une leçon d’humanité et de solidarité exceptionnelle. À lire absolument.

23 réflexions sur “[Chronique] La Tresse de Laetitia Colombani

  1. lacavernedhaifa dit :

    Je suis d’accord avec toi, ce livre est poignant, fort. Une belle surprise littéraire et un excellent premier roman ! Il se lit tout seul, se dévore même, mais ne se digère pas si facilement. C’est une lecture qui marque. Une lecture qui fait du bien, même si elle fait rendre compte de certaines réalités. Un roman puissant grâce aux trois vies de ces trois femmes. Grâce à leur trois combats ; et pas forcément (je trouve), par le rapprochement des trois histoires à la fin.

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  2. La route des lecteurs dit :

    Ce roman me tente beaucoup ! Je sais que Carnet Parisien l’a proposé pour son club de lecture cet été mais je ne pense pas avoir le temps de le lire (il n’est même pas dans ma PAL). Après, ce n’est pas très grave 🙂
    Le principal étant que je le lise un jour !

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