[Chronique] Les lendemains avaient un goût de miel de Marlène Schiappa

Publié aux éditions Charleston – 16 juin 2017 -320 pages
Lu dans le cadre de mon expérience Lectrice Charleston

Justine rentre en train de Milan où elle a réglé avec ses filles et ses deux sœurs la succession de leur arrière-grand-mère. Surprise : alors que toute la famille croule sous le luxe, elle-même hérite uniquement d’une vieille boîte en carton, remplie de babioles et d’un carnet abîmé… Elle plonge alors dans la vie de « Jolie Rose » qui lui raconte sa vie à travers les objets de cette boîte : son enfance à la fin du XIXe siècle façon La Petite maison dans la prairie à Dijon, sa famille misérable mais soudée, le retour des soldats en 1918, les concours d’écriture, les promenades avec ses sœurs, sa rencontre avec un diplomate italien… Elle se remémore par écrit tout ce qui l’a menée à une photo jaunie de « jour heureux de ses fiançailles », en 1927. Les confidences posthumes de son aïeule font écho à sa propre vie : Justine, star de la blogosphère, découvre la vie de mère célibataire et fauchée. Mais quel message Jolie Rose veut-elle lui transmettre depuis le passé ? Pourquoi une chanson revient-elle sans cesse dans le récit de son aïeule ? Et qui est ce mystérieux voisin de train, Lorenzo ? Peut-il l’aider à retrouver son véritable héritage ?

En toute honnêteté, le nom de la blogueuse et désormais secrétaire d’État en charge de l’égalité entre les femmes et les hommes, m’était absolument inconnu. Il faut avouer que son blog, Maman travaille, avait peu de chances de m’attirer étant donné que je ne me destine pas à la parentalité. Toutefois, cela ne m’empêche pas de découvrir son roman à l’occasion de ma mission de Lectrice Charleston. Ce que je veux vous dire avec ce blabla, c’est que je suis partie en terrain neutre avec ce livre, vu que je lisais ainsi « une inconnue » pour moi. Mon jugement n’est par conséquent pas biaisé par son blog ou sa popularité, ni même ses engagements politiques. Je n’ignorais pas en revanche que Marlène Schiappa avait pu exercer sa plume lors d’autres publications. J’aimerais vraiment vous dire que j’ai apprécié ce roman et soutenir cette femme impliquée dans la lutte pour l’égalité des droits hommes-femmes, mais ce faisant, je perdrais en sincérité auprès de vous. Malheureusement, l’histoire n’a pas répondu à mes attentes et si l’auteure signe ici un livre feel-good par excellence, il manque pour moi cruellement de profondeur. Explications.

Nous retrouvons notre héroïne Justine dans le train qui la ramène chez elle depuis Milan. Avec ses deux sœurs et ses filles, elle est allée régler la succession de leur grand-mère fortunée. Étonnement, et cela ne perturbe pas Justine qui a d’autres préoccupations, alors que ses sœurs héritent de biens prestigieux, elle, ne reçoit qu’une vieille boite renfermant des babioles douteuses et un carnet bien élimé. Mue par sa curiosité, elle tente de comprendre le sens de cet héritage, elle qui aimait pourtant sa grand-mère. En se plongeant dans les écrits elle s’immerge dans la vie de la vieille dame, autrefois nommée « Jolie Rose » et que celle-ci va remonter à ses fiançailles dont la photo avait marqué Justine. L’écho se produit en Justine qui voit sa vie partir un peu à la dérive avec un divorce à venir et des difficultés financières qui iront de pair. Et puis, pourquoi ce voisin de train est-il si curieux ? Qui est Lorenzo ? Entre les lignes, des signes apparaissent et la blogueuse va devoir faire son cheminement…

Je vais commencer par soulever les points positifs de ce roman et donc vous parler de ce que j’ai le plus apprécié au cours de ma lecture, qui, soulignons-le, fut globalement agréable. L’auteure, rompue à la rédaction de billets blogs, jouit d’une plume fluide, moderne, dynamique et très sympathique à suivre. Saupoudrant son histoire d’un humour justement dosé, elle parvient à retenir l’attention du lecteur qui rentre alors totalement dans l’histoire et tente de se situer sur la fresque familiale, les déboires amoureux des sœurs, mais s’interroge aussi sur Lorenzo. Concrètement, j’ai eu l’impression d’être à bord du train et de me pencher par-dessus l’épaule des sœurs ou de Lorenzo pour découvrir les secrets de Jolie Rose. Marlène Schiappa mêle alors les destins et vies des deux femmes à deux époques différentes. Généralement, ce genre d’intrigue fait totalement mouche avec moi et j’étais ainsi déjà certaine d’une chose : la découverte du passé de Jolie Rose, en écho avec la vie 2.0. de notre héroïne Justine, ne pouvait que m’attirer et me séduire ! C’est là que réside ma principale déception pourtant.

Sans doute attendais-je trop de ce roman, mais j’ai trouvé que la boite à souvenirs dont hérite Justine n’est pas suffisamment mise en valeur et ne va pas véritablement creuser l’histoire de l’aïeule. Bien entendu, tout le monde ne peut se vanter d’un destin extraordinaire et c’est bel et bien là, la force du message, mais j’aurais trouvé plus judicieux d’approfondir encore plus les souvenirs, les sentiments, les anecdotes. Ce qui manque le plus ici, c’est très certainement de l’émotion, positive ou négative, et de l’ordre dans les idées exposées. Nous avons l’impression délicate que les personnages restent tous à distance les un des autres, mais surtout qu’ils tiennent alors le lecteur lui-même encore plus à l’écart, rendant l’implication quasiment impossible. Trop de « private joke », trop répétitives et des sœurs un peu caricaturales desservent l’histoire qui aurait pourtant pu se révéler si belle. Quant à la présence de Lorenzo, tel un cheveu sur la soupe, il se mêle de tout et personne ne dit rien. Je dois avouer ne pas avoir adhéré à son personnage et à son rôle. Un figurant qui aurait sans aucun doute mérité une plus grande place ou tout du moins un temps de parole plus conséquent. Si la fin du roman se veut touchante, les fils restent grossiers tout du long et j’ai parfois eu envie de zapper quelques pages en étant persuadée que cela ne changerait pas grand-chose à ma compréhension du récit. Néanmoins, j’ai lu chaque ligne, heureusement le livre, court, demeure agréable grâce à cette plume dont j’ai cité les qualités plus haut.

Toutefois, je conclus sur une déception encore appuyée par des personnages un peu trop clichés, certes modernes, mais si peu attachants. Les dialogues, dans un style pourtant spontané, ne sonnent pas authentiques et l’on a parfois l’impression de lire un sketch entre sœurs. Heureusement, les pensées intimes de Justine et ses préoccupations nous recentrent un peu même si cette dernière ne se révèle pas particulièrement attendrissante. En perdant en naturel et en surprises, le roman, dans son ensemble, ne m’aura pas touchée et je reste sur ma faim concernant les histoires de ces deux femmes que j’aurais tant aimé apprendre à connaitre davantage. 

Marlène Schiappa signe ici un roman léger à réserver aux amateurs de feel-good. Si la lecture s’avère agréable et divertissante, nous pouvons regretter le manque cruel de profondeur apporté à l’intrigue ainsi qu’une certaine inconsistance des émotions. Soulignons toutefois que la plume, dynamique et moderne reste appréciable. Parfait pour votre été, mais n’en attendez pas trop. Une auteure à suivre malgré tout.

17 réflexions sur “[Chronique] Les lendemains avaient un goût de miel de Marlène Schiappa

  1. pepparshoes dit :

    Je lui ai mis la même note que toi. Il se lit super vite, Parfait pour le bord de la piscine, mais il ne faut pas trop en attendre. Et j’en attendais énormément, justement a cause de son titre politique… Mais globalement j’ai passé un super Moment, j’attendais juste quelque Chose qui n’arrivait pas ^^

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