[Chronique] Constance de Rosie Thomas

Publié aux éditions Charleston – mars 2017 – 432 pages 
Lu dans le cadre de mon aventure Lectrice Charleston

« Une histoire que vous n’oublierez jamais »
Romantic Times Book Review

Très loin de son Angleterre natale – et d’un chagrin d’amour auquel elle ne pourra jamais vraiment échapper –, Connie (Constance) s’est créé une nouvelle vie à Bali, dans un endroit idyllique à la végétation luxuriante. Mais lorsqu’elle reçoit un appel de sa soeur Jeanette, mourante, elle se doit de retourner à Londres. Pourtant les sentiments qui les lient ne sont pas des plus simples. L’une était ténébreuse, l’autre, un véritable soleil. Jusqu’à ce qu’elles tombent amoureuses du même homme… Avec l’amertume de la trahison entre elles, les deux soeurs doivent apprendre à se pardonner. Pourront-elles retrouver les liens partagés lors de leur enfance et dépasser les mensonges ?

Voici une autre lecture Charleston qui m’a véritablement séduite. Plus j’avance dans l’aventure, plus je me rends compte que les valeurs véhiculées par la maison d’édition et leurs auteurs soigneusement choisis correspondent à mes attentes. J’aime les histoires féminines et identitaires ou familiales et forcément avec Charleston, je suis comblée. Constance peut paraitre un peu déroutant au départ et on peut même se demander où veut en venir l’auteure. Mais très vite, ces destins croisés nous emportent et nous touchent, nous entrainent dans un tourbillon émotionnel, celui de la vie et de la survie, celui des regrets et de l’avenir. Derrière une plume dense se cachent la douceur de l’amour, les remords et les pardons, l’amour et les liens puissants. Derrière les sacrifices se cachent du bon sens, de l’honnêteté et du respect et puis le temps, valeur fondamentale lors de deuils ou de séparation, toujours viendra tel un baume à la rose, panser les blessures les plus rudes. La jeunesse et la vie plus avancée se croisent, l’innocence et le poids des ans flirtent pour mieux se comprendre et chacun apprend de l’autre pour avancer sur le chemin pavé d’obstacles qu’est la vie.

Constance est un roman dense et intense qui nous entraine au cœur de liens familiaux et d’une puissante notion d’identité. Oui, encore une fois, cette thématique de l’identité me fascine et m’intrigue, m’emportant alors dans un récit passionnant qui ne concerna pas seulement cette quête. Constance est un bébé abandonné par sa mère biologique, mais qui va grandir dans une famille où une grande sœur est déjà présente. Mais Jeannette n’est pas une sœur comme les autres, elle est sourde. Nous sommes alors au cœur des années 60, bien loin de la prise en charge de soins. Nous comprenons dès le début du roman que Jeannette et Constance ne se parlent plus en raison d’une erreur de la part de Constance. Mais Jeannette souffre d’un cancer et la fin s’annonce… Malgré tout, elle a plus que jamais besoin que sa sœur soit près d’elle.
Parallèlement, le fils de Jeannette rencontre Roxanna, une jeune fille à la beauté pure et au caractère fort. Elle cherche un petit boulot et veut s’établir en Angleterre, elle n’a plus aucune raison de rester dans l’instabilité politique de son pays d’origine : l’Ouzbékistan. En effet, sa famille ayant péri, la jeune femme, intelligente, cherche à « devenir quelqu’un ».
Nous allons donc suivre ces histoires de vie qui se croisent et se décroisent, se mêlent pour s’enrichir des erreurs des uns des autres, des malheurs, des joies et des bonheurs. Et puis Constance notre héroïne musicienne nous envoutera avec sa vie à Bali et ses traditions, mais aussi avec sa musique, dont elle a fait sa vie. Chaque personnage détient une lumière, une vérité qu’il peut transmettre à l’autre.

Si les relations entre Constance et Jeannette peuvent s’imputer à une erreur en particulier, nous comprendrons vite aussi le poids de l’éducation et de la différence entre ces deux jeunes filles auprès de leurs parents. L’une comme l’autre a vécu des choses particulièrement difficiles, ne trouvant que douloureusement leur place. Constance apprendra assez tardivement et dans un contexte inadapté qu’elle est une enfant adoptée et elle comme Jeannette en comprendront les sensibles raisons. Difficile de s’entendre quand on est mises en compétition dès le plus jeune âge et pourtant, nous ressentons, à côté de l’amertume, tout l’amour qu’il y a entre ses deux sœurs et qu’importe le lien du sang. Jeannette va avoir besoin de Constance avant de dire adieu à ce monde, bien trop tôt. Et cette dernière répondra évidemment présente. Imaginez la frustration, quand vous êtes musicienne professionnelle de ne pouvoir faire écouter votre art à votre grande sœur. Et, bien entendu, cette frustration ira dans les deux sens. Pourtant, Rosie Thomas s’affranchira de ce handicap, qui, même s’il a marqué la vie de ces femmes dans leur enfance, n’est plus véritablement un problème pour Jeannette au quotidien. Certes, c’est quelque chose de difficile, mais elle a su faire sa vie avec son mari et son fils.

Son fils d’ailleurs tombe amoureux de Roxanna. Si nous, lecteurs, comprenons que la forme d’amour n’est pas identique d’un côté et de l’autre, lui sombrera totalement et deviendra dépendant de la jeune femme qui n’aspire qu’à une liberté nouvelle. Cette jeune étrangère ne cessera de nous épater par son courage, sa volonté à s’intégrer et un jour devenir quelqu’un de bien, une véritable Anglaise. Mais peut-on vraiment changer notre nature ? Face aux épreuves, Roxanna sera parfois déroutée par un pays bien différent du sien. Elle nous apprendra beaucoup de choses sur le contexte politique et même économique d’un pays que bien peu d’entre nous savent situer sur une carte. Nous comprendrons alors qu’elle a dû en passer par de sacrées épreuves pour en arriver là où elle est et que si son frère n’avait pas disparu, mort comme on le lui a affirmé, elle ne se serait peut-être jamais enfuie vers un nouveau pays. La relation qui se noue entre Constance et Rosie est pleine d’émotion et nous touche, car au fond, les deux femmes se ressemblent un peu. Elles ne trouvent pas vraiment leur place et cherchent le bonheur, le vrai, le durable…

Si Constance est épanouie professionnellement, c’est bel et bien au détriment du reste. Certes au début du roman elle vit dans un cadre idyllique à Bali et nous y entrainera de nouveau, mais sa vie sentimentale s’est éteinte avec son grand amour il y a des années. Ce grand amour que nous approcherons petit à petit et qui fera battre notre cœur. Pourquoi ce choix de vie quand tout le reste s’offrait à elle ? L’amour que Constance porte à ses proches est incroyable et comme je le disais plus haut, s’affranchit des liens du sang. La preuve, elle adopte Roxanna sans même se poser de questions et pourtant cette jeune femme commettra des erreurs dues à sa naïveté dans un pays bien différent du sien. Mais son amour pour Jeannette est incomparable et même si un froid les sépare, nous saisissons pleinement le sens du sacrifice et du lien fraternel. Aussi, à l’approche de la mort, les relations entre les deux sœurs évoluent et l’auteure nous offre de magnifiques scènes. Nous serons ainsi gâtés par une romance en filigrane, amère et douloureuse mais également par la lumière et l’espoir. Cette histoire que l’on suit, pour laquelle nous retenons notre souffle, nous éblouit par sa pureté et par l’abnégation dont ont fait preuve les personnages.
C’est le cœur serré que nous refermons ce livre, émus et touchés. Car s’il faut souligner autre chose, sans trop dévoiler cette intrigue, c’est que la plume de Rosie Thomas est admirable. Pleine de sens, d’observation et de contemplation, elle nous transmet avec passion les ambiances et émotions. Très descriptive, elle n’hésitera pas à nous poser en spectateur de rites particuliers ou de souvenirs intenses. Mais toujours, la beauté de l’amour, des sentiments, de la liberté, reste accrochée au fil des pages. L’immersion à Bali et au cœur de ses coutumes est absolument fascinante et nous avons également envie d’en savoir encore plus sur l’Ouzbékistan, ce pays lointain et si inconnu. Des découvertes, des émotions positives comme négatives, mais une grande lumière, beauté et fraternité imprègnent chaque ligne de ce roman. Quant à la fin, elle ne pourra que faire battre notre cœur encore plus fort, et ce après avoir dû verser quelques larmes bien avant.


En bref, Constance est une fresque familiale magnifique et complexe, dense et lumineuse. Chaque personnage joue son rôle, de même que les notions de filiation, d’identité, d’amour et de pardon. Un roman à lire absolument pour sa beauté et ses sublimes messages. Le choc des cultures se veut fascinant et instructif.

6 réflexions sur “[Chronique] Constance de Rosie Thomas

  1. Vampilou fait son Cinéma dit :

    Encore une fois, un roman de cette maison d’édition que tu me fais découvrir et qui me fait terriblement envie, je vais devenir addict !

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  2. anouklibrary dit :

    Je le note aussitôt ! J’avais beaucoup aimé Les brumes du Caire de Rosie Thomas qui m’avait déjà charmé par le voyage en Egypte qu’elle nous faisait faire. Un petit tour à Bali me tente encore plus 🙂

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