[Chronique] Les amants du presbytère de Marie-Bernadette Dupuy

lesamantsdupresbyterePublié aux éditions calmann-lévy – 11 janvier 2017 – 320 pages
Merci à calmann-lévy pour cette lecture
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Nommé curé d’un petit bourg rural, le jeune et séduisant Roland Charvaz n’a pas la vocation. Le beau sexe le préoccupe davantage que le salut de ses ouailles. Pour sa part, Mathilde, la jolie épouse du docteur local, n’a jamais connu la passion amoureuse avant l’arrivée de l’ecclésiastique. Dès leur première rencontre, c’est le coup de foudre et les deux amants se lancent dans une brûlante liaison.
Ils se croient à l’abri de tout soupçon. Ils ont tort. Ils seront bientôt victimes de la plus horrible des machinations…

Marie-Bernadette Dupuy a tiré d’une authentique et retentissante affaire criminelle une intrigue haletante qui nous entraîne dans la spirale infernale de la passion.

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Bienvenue à Saint-Germain-de-Montbron, en Charente. Nous sommes en 1849 et la petite commune va bientôt accueillir au sein de son presbytère un nouveau curé. L’ancien aurait été vu dans des situations compromettantes, et donc démis de ses fonctions. Mais le récent arrivé, Roland Charvaz n’a pas vraiment la vocation. Il place plus sa foi en la sensualité et en ces plaisirs charnels offerts par une femme, qu’en Dieu et sa religion. Qu’importe l’interdit, tant qu’il n’est pas pris. Il va alors tomber rapidement sous le charme de la délicieuse épouse du docteur de Salignac, Mathilde. La pauvre jeune femme, mère d’un petit garçon adorable, n’a jamais connu la passion amoureuse, mais juste une union bien banale. Malheureuse dans sa vie, elle aspire au romantisme et au feu de l’amour qui la consumeraient au quotidien. Quand elle rencontre Roland Charvaz, elle sait qu’il est celui qui va la faire vibrer et se sentir vivante, femme et aimée. Dès lors, les amants vont multiplier les rendez-vous clandestins et leur aventure torride restera bien cachée… à moins que…

Je dois avouer que la plume de Marie-Bernadette Dupuy m’était, avant cette lecture, totalement inconnue. Pourtant, une chose est indéniable, elle sait raconter les histoires. Ici, elle part d’une authentique et sordide affaire qui a ébranlé la tranquillité charentaise, celle d’une liaison entre un curé et la femme du docteur, mais bien au-delà, un crime inédit dans le coin. Sacré pari que de se lancer à raconter une telle histoire, mais pour autant nous ne trouvons pas le temps de nous ennuyer et nous regardons les personnages évoluer avec une grande curiosité. Marie-Bernadette Dupuy adopte un point de vue plutôt neutre, le plus objectif possible et nous sentons l’incroyable travail de documentation qui ressort au travers du récit qu’elle nous offre. Premièrement, pour ceux qui ne connaissent pas la région charentaise, pas de soucis, elle saura vous immerger dans les hauteurs d’Angoulême et des villes alentour, à l’époque bordée donc de campagne, je rappelle que l’affaire se déroule autour de 1850. Nous sommes rapidement plongés dans l’ambiance et le décor, mais surtout dans les mœurs et rêves de Mathilde. La jeune femme, bien que n’ayant rien à reprocher à son mari aimant, rêve d’une folle aventure romanesque et de rapports passionnés, fusionnels, charnels. Elle ne tardera pas à courir à la rencontre du Père Charvaz qui tombera immédiatement sous son charme. Entre eux, les choses vont aller vite, très vite. Bientôt, l’amour sera au rendez-vous et ils ne pourront plus se passer l’un de l’autre. Mais le danger les guette. Eux qui croyaient être bien cachés…

« C’est de lui, oui, c’est de lui que j’ai tant rêvé! se disait-elle. Je me moque qu’il soit curé, oui, je m’en moque éperdument, car il me plaît. Je voudrais le revoir, me retrouver seule avec lui comme tout à l’heure! »

« De servir Dieu n’oblige pas à la solitude ni à la mortification. On doit aimer son prochain et sa prochaine, il me semble… »

Les amants du presbytère n’est donc pas une « simple » histoire d’amour comme pourrait le suggérer son titre. Si la passion et la romance sont au rendez-vous, c’est pour mieux mettre en place l’intrigue la plus importante de l’affaire, celle d’un crime. Ainsi nous avons une vue d’ensemble fascinante du roman avec l’avant, le pendant et après. Divisé en partie, le roman nous plonge au cœur des interrogations, peurs, doutes et regrets. Si l’amour fut la trame des 100 premières pages, il sera vite balayé au profit d’une ambiance plus sombre de menaces. Un nouveau personnage entre ainsi dans la danse et rien ne nous la rend véritablement sympathique. Pourtant, encore une fois, l’auteur se met à distance de l’histoire en adoptant le point de vue le plus juste possible. Mais certaines choses venant de ce témoin gênant iront jusqu’à agacer le lecteur qui se demande ce qu’il va bien pouvoir se passer maintenant. Nous passons alors à un autre registre et nous interrogeons « jusqu’où pouvons-nous aller pour sauvegarder les apparences. Pour s’aimer sans éveiller les soupçons ? » Fuir ? Difficile. Madame de Salignac mène un train de vie très éleve et surtout il y a son petit garçon, qu’elle ne peut pas arracher à son père comme ça. Et puis Roland est curé, difficile de renoncer même s’il n’aime absolument pas son métier et qu’il n’a pas la foi.

« Les gens ne peuvent pas s’empêcher de calomnier, de juger les choses sans rien y comprendre. »

« Si, en plein été, un jour de grosse chaleur, je sors en robe légère, je deviens suspecte d’indécence; si, l’hiver, afin de me préserver du froid, je m’enveloppe d’une cape, je suis également soupçonnée de courir à un rendez-vous galant. »

S’en viennent alors les thèmes de la foule et des on-dit, du voyeurisme et du jugement hâtif sans connaitre. Nous n’étions qu’en 1850 et pourtant l’affaire s’est répandue comme une trainée de poudre par la presse et les ragots. Très vite, le scandale éclate, l’enquête prend un nouveau tournant, la peur s’empare de certains protagonistes, d’autres ont bien du mal à saisir ce qui est réellement en jeu. Incroyable, inavouable, coupable. La haine déferle, le harcèlement happe les personnes alors même pas encore jugées. Et quand le procès a lieu, il apparait évident que la partie est déjà engagée et le pronostic assuré. Cet aspect très « populace » du roman rend terriblement compte de la réalité et du retournement de situation, du changement d’avis pour se rallier aux autres, de la haine versée sans rien connaitre de l’histoire. Existe-t-il des crimes légitimes ? Sans doute… Celui du livre en est-il un ? À vous de juger, car je ne vous ai parlé ni de l’auteur ni de la victime. Sachez que cela s’avère inattendu et croustillant et que les villageois ne manqueront pas de cracher leur fiel sur ceux qu’ils ont pu encenser. Toujours est-il qu’on nous offre ici une immersion dans un système judiciaire d’époque, mais aussi dans le fonctionnement pénitentiaire et que c’est très instructif. Finalement, Les amants du presbytère vous apporte un lot de sentiments et d’émotions fort sympathique, mais également des connaissances géographiques, populaires et historiques. Si nous savons tout du crime, il n’en est rien pour la justice et c’est un véritable plaisir que de les suivre au cours de leur enquête. Certaines erreurs coûtent cher. Quant à nos amants, je vous laisse le soin de découvrir par vous-mêmes ce qu’ils sont alors devenus… À moins que vous ne connaissiez déjà l’issue de l’histoire inspirée des faits réels de l’époque.

enbref

Les amants du presbytère se présente comme une romance historique classique, mais très vite, un crime va tout faire basculer. En cherchant les coupables, des scandales remontent et indignent la population. Tableau fidèle de l’histoire vraie qui a inspiré le roman, le lecteur suit avec avidité la romance passionnée et le procès survolté. Un style agréable à découvrir.

MANOTE

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