[Chronique] La sonate oubliée de Christiana Moreau

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Publication aux éditions Préludes – 4 janvier 2017 – 256 pages
Merci à Netgalley et aux éditions Préludes pour cette lecture

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Deux jeunes filles réunies à travers les siècles.
Deux coeurs passionnés de musique de liberté.
Une ville, Venise, jadis et aujourd’hui.
À 17 ans, Lionella, d’origine italienne, ne vit que pour le violoncelle, ce qui la distingue des autres adolescents de Seraing, la petite ville où elle habite en Belgique. Elle peine toutefois à trouver le morceau qui la démarquerait au prochain grand concours Arpèges. Jusqu’au jour où son meilleur ami lui apporte un coffret en métal, déniché dans une brocante.
Lionella y découvre un journal intime, une médaille coupée et… une partition pour violoncelle qui ressemble étrangement à une sonate de Vivaldi.
Elle plonge alors dans le destin d’Ada, jeune orpheline du XVIIIe siècle, pensionnaire de l’Ospedale della Pietà, à Venise, dans lequel « le prêtre roux », Antonio Vivaldi, enseignait la musique à ces âmes dévouées.

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La sonate oubliée m’a charmé par sa couverture si poétique et mystérieuse, mais également par son nom. Et puis en lisant la 4e, j’ai succombé. Oui, j’adore les destins croisés, les époques qui se mêlent pour former une sublime histoire et célébrer une personne du passé. De plus, les premiers avis publiés sur le livre sont encourageants. Je m’attendais à passer un moment merveilleux, fascinant. Malheureusement pour moi, la magie ne fut pas au rendez-vous. Et si l’histoire reste jolie et agréable à lire, je n’ai pas été convaincue par nos héroïnes ni par l’intrigue en elle-même. Au moins hommage est rendu à la musique classique et aux orphelines, musiciennes de talent bien vite tombées dans les méandres de l’oubli de l’Histoire.

Lionella a 17 ans, mais se comporte d’une manière bien différente des autres adolescents. Ayant très jeune reçu une éducation musicale de pointe et choisissant un instrument aussi majestueux et sensuel que le violoncelle, la jeune femme est devenue une jeune prodige dans son domaine. Sûre d’elle, elle ne vit que pour la musique et se rend très inaccessible. Seul son meilleur ami Kevin, qui s’avère totalement épris d’elle, peut parfois accéder à son univers secret. C’est ainsi que lors d’une brocante dans son quartier industriel en pleine reconstruction, Kevin déniche un coffret ancien en métal : à l’intérieur une médaille coupée et ternie par les années, un journal intime et surtout une partition pour violoncelle. La jeune fille identifie tout de suite les mouvements et en est persuadée : elle tient ici en mains une partition égarée de Vivaldi. Vivaldi ce musicien mal aimé, prêtre roux et qui sombra dans l’oubli pour être remis au goût du jour des années plus tard. Lionella voit en cette partition une occasion en or pour sa carrière. En effet, elle va devoir interpréter un morceau de Vivaldi pour un prestigieux concours international. Osant tout et avec le soutien de son professeur, la jeune femme entreprend de se plonger dans cette sonate inédite. Mais peut-elle certifier de l’authenticité de l’œuvre ? Constitue-t-elle vraiment une sonate de Vivaldi ? En parallèle, elle décide de s’immerger dans le journal d’Ada, cette jeune orpheline qui eut la chance de jouer avec et pour Vivaldi. Qu’a-t-elle à révéler de son époque et de son enseignement ? Détient-elle la clé de l’œuvre que Lionella s’apprête à rendre publique ?

Véritable ode à la musique et à l’importance de la composition, La Sonate oubliée vous invite à voyager de Seraing à Venise, du XVIIe à nos jours. Lionella ne vit que pour et par la musique. Malheureusement, c’est une jeune femme à laquelle je n’ai absolument pas réussi à m’accrocher. Je l’ai trouvée égoïste et peu reconnaissante, trop sûre d’elle et fière. Alors que son meilleur ami Kevin se démène depuis toujours pour lui faire plaisir, elle n’hésite pas à se servir de lui sous couvert de leur amitié. Lionella ne m’a donc pas séduite et ce ne fut pas facile de continuer la lecture avec ce constat. Heureusement, grâce au journal d’Ada nous allons partir à la rencontre d’autres personnages, notamment quelques orphelines de l’Ospedale della Pietà et d’Antonio Vivaldi. Si les éléments apportés par l’auteure demeurent fictifs, les grands faits historiques incarnent quant à eux la vérité et je fus fascinée d’apprendre toutes ces choses que j’ignorais à propos de ces orphelines-musiciennes tombées dans l’oubli. De même, si j’ai eu la chance d’avoir une initiation musicale avancée, Vivaldi restait pour moi assez mystérieux. Quel bonheur j’ai eu d’écouter alors ses compositions en lisant le roman. Je me suis longuement attardée sur le violoncelle pour en comprendre l’âme, le souffle, la sensualité et les nuances. Ainsi, j’ai pu, petit à petit entrer dans l’univers de Lionella, non pas au travers de son histoire, mais bel et bien au travers de sa musique.

Les époques alternées sont placées de manière intelligente, pertinente. Découvrir la vie d’Ada fut très intéressant, même si je dois avouer qu’elle aborde son journal d’une façon un peu particulière. J’ai d’ailleurs été gênée par son vocabulaire qui, à mon sens, paraissait presque trop moderne. Certes, nous accédons à la traduction faite par Lionella et donc une fille des temps actuels, mais j’aurais aimé quand même pouvoir ressentir un langage plus d’époque. Toutefois, le contexte historique ne manquera pas d’honorer le lecteur de sa présence, et les escapades dans les rues de Venise deviennent addictives. Nous rencontrons également le plus célèbre luthier de tous les temps et s’il ne nous est pas présenté sous son meilleur jour, au moins est-il reconnu pour son travail de maître et de génie. Quant à Antonio Vivaldi, c’est un personnage intrigant, fascinant même et nul besoin de préciser que sa vie entière fut consacrée à son œuvre et qu’à l’heure actuelle, de nombreuses compositions demeurent introuvables.

L’intrigue de la sonate quant à elle manque légèrement de profondeur. Lionella, en raison de son caractère, a tendance à n’écouter que son instinct et embarque tout le monde sur sa lancée, sans se préoccuper des conséquences. Toutefois, elle saura faire preuve d’honnêteté et de maturité à un moment capital de l’histoire. Si Lionella est fin stratège pour sa carrière, elle n’en demeure pas moins une musicienne de talent, sensible et passionnée, habitée véritablement par son instrument et cette fameuse sonate qui l’obsède. De même, le journal constituera pour elle une constante dans sa vie et elle se donnera pour but de le lire jusqu’au bout afin de comprendre ce qu’est devenue Ada. Comment ce coffret a-t-il pu atterrir en Belgique sur une quelconque brochante ? Et au travers de l’histoire de la jeune orpheline, c’est une véritable leçon de vie que va suivre notre violoncelliste.

Alors pourquoi suis-je mitigée sur ce roman ? Parce que, pour moi, il y a un manque d’émotions, de sentiments. Certes, lors des diverses interprétations musicales, ces éléments perdurent. Mais en dehors de cela, Lionella nous apparait bien froide et égoïste, peu intéressante. Kevin, lui, saura apporter la dose de lumière et d’amour, de dévotion et de solidarité. Coincé dans une famille fort peu équilibrée, il trouve en Lio son échappatoire et son amour de toujours. Le professeur de Lionella n’apportera malheureusement rien de plus, si ce n’est que, comme les autres, il cède aux moindres des caprices du jeune génie pour ne pas la contrarier. Ces comportements trop avenants envers la jeune fille n’aident pas à apprécier plus cette dernière et c’est fort dommage. Quant à Ada, elle reste plus accessible au travers de son journal et nous offrira un relief plus intéressant au cœur d’une vie pourtant plus austère, mais surtout grâce à son immense passion pour la musique et la confiance qu’elle place en Vivaldi. Enfin, le récit se terminera sur des révélations intéressantes, mais frustrantes, nous aurions aimé en savoir plus sur le destin de cette femme du temps passé.

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Un roman tout en douceur, croisant le destin de deux jeunes femmes éprises de la musique et de leur instrument : le violoncelle. Au travers de l’interprétation d’une sonate oubliée, Lionella va découvrir la vie d’une femme du XVIIIe qui côtoyait le grand Vivaldi. Malheureusement, l’héroïne est agaçante et ne nous permet pas de la suivre avec entrain. L’histoire reste belle et constitue un hommage exceptionnel à la musique et aux jeunes orphelines musiciennes oubliées.

MANOTE

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21 réflexions sur “[Chronique] La sonate oubliée de Christiana Moreau

  1. Lupa dit :

    Je l’avais déjà repéré, à vrai dire surtout pour son titre ^^ Du coup, je ne sais plus trop quoi en penser, car cette histoire d’héroïne agaçante me fait un peu réfléchir… on verra si l’occasion se présente 😉

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  2. christiana Moreau dit :

    Vous avez aimé « La sonate oubliée »?

    Sortie le 24 avril 2019 du nouveau roman de Christiana Moreau « Cachemire rouge » aux éditions Préludes.

    Trois destins liés par un fil rouge, celui d’un précieux cachemire tissé de manière ancestrale. Toscane. Alessandra est fière de la qualité des pulls et étoffes qu’elle vend dans sa boutique de Florence. Une fois par an, elle va s’approvisionner en Asie. Jusqu’à ce coup de foudre pour le cachemire rouge filé par une jeune fille, Bolormaa. Dans les steppes de Mongolie, celle-ci mène une existence nomade avec sa famille, en communion avec la nature. Mais, lorsqu’un hiver glacial décime leur troupeau de chèvres, elle doit quitter ses montagnes pour travailler à l’usine en Chine.
    C’est là qu’elle rencontre XiaoLi. Bientôt, dans l’espoir de se construire un avenir meilleur, les deux amies font le choix du départ. De l’Asie à l’Europe, du Transsibérien jusqu’en Italie, elles braveront tous les dangers pour prendre leur destinée en main et tenter de réaliser leur rêve.

    Avec humanité et un grand sens du romanesque, Christiana Moreau compose une histoire vibrante, véritable ode à l’amitié et au courage.

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