[Chronique] NEED de Joelle Charbonneau

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Publié aux éditions Milan – Octobre 2016 – 316 pages
Livre lu dans le cadre du club de lecture des hiboux de Saefiel.

resume
Les adolescents du lycée de Nottawa se réunissent tous sur NEED, un nouveau réseau social qui leur promet de répondre à leurs besoins sous couvert d’un total anonymat, quels que soient ces besoins… et quelles qu’en soient les conséquences. Car, c’est bien connu, on n’a rien sans rien. Et si au départ la contrepartie semble dérisoire, il y a bientôt des morts dans la petite communauté…

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Désir : Envie de posséder un objet ou de réaliser un rêve.
Besoin : Nécessité de détenir quelque chose ou d’accomplir un acte essentiel à votre vie.
De quoi avez-vous besoin ?

Kaylee passe du temps avec son meilleur ami Nate quand il lui fait part d’un nouveau site de type réseau social réservé aux élèves de leur lycée : NEED. Ce site propose de réaliser vos rêves, en vous fournissant l’objet de vos désirs. Mais rien n’est totalement gratuit. Si tout commence avec des contreparties bien dérisoires à base de simples invitations e-mail, bien vite, le réseau va devenir plus gourmand et plus dangereux. Tout comme les utilisateurs. Mais qu’est-ce que NEED ? Qui se cache derrière tout cela ? Mystère. Kaylee n’a pas de désirs, mais un besoin, vital : un rein pour son frère qui sinon mourra bientôt. Intriguée, elle finit par s’inscrire sur le site et soumettre sa requête. Petit à petit, les élèves obtiennent ce qu’ils veulent tout en préservant l’anonymat des membres. Mais quand NEED commence à demander des missions bien particulières aux adolescents, il est déjà trop tard pour reculer. Kaylee n’aura d’autre choix que de comprendre le système, ses enjeux et surtout à qui tout cela profite réellement. La petite communauté est ébranlée par les morts et les mystères qui s’accumulent. Les adultes restent dans le flou, seuls les adolescents connaissent et peuvent accéder au réseau…

NEED incarne à la perfection ce genre de roman qui vous remet à votre place, et ce très rapidement. Dès les premières lignes, que je vous ai mises en citation juste au-dessus, on comprend qu’il est primordial de saisir la différence entre ces deux notions, besoin et désir. Pourtant, nous les confondons, les mêlons allègrement dans notre quotidien. Mais pas le réseau NEED qui curieusement satisfait les désirs, mais semble prendre plus de temps pour les besoins. Kaylee sent dès le départ que quelque chose cloche sur ce site. Qui peut se permettre de financer tout cela ? Ordinateurs, téléphones portables dernier cri, jeux vidéos… Tout cela représente un coût. Et pourquoi ce réseau se destine exclusivement à son lycée ? Préoccupée principalement par la santé de son frère, Kaylee en oublie parfois de vivre. Mais ici, aucune chance de souffler, elle devra affronter ses peurs, les vérités et NEED. Quand les morts pleuvent, les coupables deviennent cible numéro 1.

Entre leçon de morale et thriller psychologique, NEED excelle à retracer la vie des adolescents que nous allons suivre dans ce roman. Usant de plusieurs voix, Joelle Charbonneau nous fait entrer au plus profond des émotions et sentiments de ses personnages en nous laissant voir et comprendre leurs motivations. Si l’identité du ou des personne(s) derrière NEED nous apparait presque clairement un peu avant la révélation, l’auteure n’en garde pas moins des atouts en mains qu’elle nous livrera à chaud et pour mieux nous étourdir. La trame narrative est fascinante, brillante et conduit vers un questionnement très pertinent à l’heure où les réseaux sociaux demeurent omniprésents dans notre vie. La psychologie qui se glisse entre les pages n’est ni intrusive ni grossière, mais délivre juste ce qu’il nous faut pour comprendre comment le tout se déroule et les intérêts de chacun. Les caractères sont modelés, ajustés et évoluent en fonction de ce que le réseau apporte à chacun. Angoissant, le site NEED semble jouir d’une toute-puissance et d’un contrôle total sur la vie de nos personnages. Omniprésent, il sait tout et anticipe chaque déplacement de pions du camp adverse.

NEED instaure une tension psychologique et aussi affective puisque le petit frère malade de Kaylee restera au cœur de nos préoccupations. Fascinante également, l’histoire de son amitié avec Nate, nous sera exposée et décortiquée d’une manière crue, mais saisissante. Kaylee n’a rien d’une héroïne de roman young adult, tout ce qu’elle souhaite, c’est sauver son frère. Pourtant, elle va devoir se coller au « combat » si elle désire empêcher un autre drame de se produire et rester en vie. Mêlant action et réflexion, le roman ne propose pas de temps mort ou de rythme déséquilibré. Addictif, nous le lisons alors rapidement pour comprendre tout ce qui se cache derrière NEED et son fonctionnement. Pourtant, les réponses resteront succinctes, mais efficaces. La solution à tout ce problème s’avérera pertinente, logique, mais parfaitement cruelle, pouvant rendre le lecteur un brin paranoïaque. Au moins sommes-nous prévenus, les réseaux sociaux sont le danger de notre société. Mais l’autre menace demeure l’humain : jusqu’où est-il prêt à aller pour voir ses moindres désirs assouvis ?

NEED dispose enfin d’un atout majeur : la plume de Joelle Charbonneau. Si je parlais des personnages auxquels nous pouvons accéder aisément, du récit à plusieurs voix ou encore du rythme parfaitement instauré, n’oublions pas de dire que son écriture est fluide et efficace. Pas de figure de style, elle va droit au but et nous entraine dans cette course contre la montre pour la vérité, dans ce parcours semé d’embûches qui doit mener forcément à quelque chose, sans quoi NEED n’existerait pas. Adaptant sa plume à chaque introspection relative donc à chaque personnage, elle parvient aussi à faire monter la tension psychologique, l’électricité entre les personnages, le climat paranoïaque et le désespoir face aux incrédules. Parfaitement maitrisée l’intrigue tient en haleine et convainc ! NEED est à portée de clics, gardons l’œil ouvert.

 

enbref

Le nouveau roman de Joelle Charbonneau incarne le parfait thriller young adult et psychologique. En nous entrainant sur des pistes pertinentes de réflexion sur la distinction entre besoin et désir, elle parvient également à nous présenter les réseaux sociaux sous un jour bien peu brillant. Haletant, addictif et avec une intrigue bien maitrisée, NEED se dévore rapidement et nous refermons le livre la tête pleine d’interrogations.

MANOTE

17/20

4flamants


CITATIONS

 

« De quoi a-t-il besoin ?
La réponse est simple. D’argent. On a toujours besoin d’argent. Maintenant, il doit juste décider combien. »

« Techniquement, elle n’a besoin de rien, mais en faisant défiler la liste des requêtes, elle tombe sur quelque chose dont elle saurait clairement quoi faire.
Je veux avoir le droit de rentrer plus tard la nuit du réveillon. »

« -Nate, regarde ! On est bien d’accord ? Quand on a crée un compte, on ne peut pas le supprimer ?
-Non. Mais ça, c’est un peu pareil pour tous les réseaux sociaux. Ils affirment que tu peux te désabonner quand tu veux, mais en réalité, ton compte n’est jamais fermé.
-Donc, le nombre d’utilisateurs devrait soit augmenter, soit rester le même ?
-Oui, bien sûr.
Je repense à hier matin, juste avant que j’appelle la police.
Et je suis sûre de moi.
-Le chiffre a baissé. »

« Ce n’est pas elle qui a décidé. NEED a refusé de lui donner les billets de concert qu’elle demandait la première fois et c’était injuste. Les parents de **** ont forcément fait quelque chose pour que quelqu’un leur en veuille autant. Et ça non plus, ce n’est pas de sa faute. »

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