[Chronique] Un manoir pour refuge de Ena Fitzbel

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Publié aux éditions Rebelle (Collection Chimère) – Novembre 2016 – 340 pages 

resumeÉlève au lycée français de Prague, Mila fait chaque nuit ce rêve étrange et rassurant d’un manoir perdu au fin fond de la lande écossaise. Elle y rejoint une amie chère à son cœur et Kenneth, un mystérieux jeune homme dont elle est tombée amoureuse.
Un jour, elle révèle à sa classe l’existence du manoir. Le soir même, le rêve qu’elle croyait immuable s’en trouve bouleversé : une domestique disparaît, tandis que l’une de ses camarades à Prague plonge dans un sommeil léthargique.
Mila doit se rendre à l’évidence : son rêve n’est pas comme les autres. Les frontières entre songe et réalité n’en finissent pas de se brouiller. La jeune fille est cependant loin d’imaginer la véritable nature de ce qui pourrait devenir un vrai cauchemar.
Commence alors une course contre la montre pour échapper à son emprise. Laissez-vous entraîner dans un univers onirique empreint de mystère !MONAVISV2

Tout d’abord, merci aux éditions Rebelle pour ce Service de Presse. Je l’avais repéré pour sa couverture, il est vrai que j’adore le travail de Karen, mais aussi pour son synopsis bien mystérieux. De plus j’avais envie d’une lecture un peu différente. Pour être différente, elle l’est croyez-moi. À aucun moment, je n’ai vu venir les pistes et évènements qui allaient se produire dans le roman. Ena Fitzbel m’a surpris du début à la fin de son roman, s’affranchissant des clichés et platitudes à merveille. Résultat, un livre qui m’a décontenancé, mais que je n’ai pas pu lâcher et que j’ai globalement apprécié. D’ailleurs, j’attends d’ores et déjà la suite avec impatience.

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L’histoire est originale sur bien des points. Tout commence au lycée français de Prague où Mila présente sa nouvelle, inspirée de son rêve et que sa meilleure amie Tiffany a illustrée. Chaque nuit, Mila fait le même rêve, un peu étrange, où elle rend visite à une amie dans un manoir perdu dans la campagne écossaise. Là-bas, elle rencontre un jeune homme dont elle s’éprend. Mais quand l’existence de son univers onirique est révélée à la classe, lors d’un cours d’écriture, le monde bien connu de Mila se transforme. En effet, des choses changent, les actions ne sont plus les mêmes, elle rencontre de nouveaux arrivants. À son réveil elle apprendra aussi qu’une des élèves de sa classe ne se réveille plus. Que s’est-il passé ? Mila va devoir trouver le mystère de ce manoir, de son rêve et surtout la fragile frontière qui doit bien exister entre rêve et réalité ! Car pour le moment, le rêve semble tourner au cauchemar pour un certain nombre de personnages et Mila va devoir faire des choix, rapidement. Nous plongeons avec elle dans cet univers mystérieux et qui va nous réserver grand nombre de surprises.

Le roman s’incarne dans un style vif et détaillé, nous offrant de parfaites représentations et des descriptions d’une précision fine, sans toutefois nous assommer de détails. Ainsi, le lecteur n’a aucun mal à se figurer les lieux qui l’entourent, en particulier quand il retourne au manoir. De même, les deux univers vie réelle/onirique demeurent fluides et s’enchainent sans ruptures, la transition opérant à merveille grâce à la magie des descriptions, des lieux et contextes. À l’aide d’informations d’une pertinence remarquable, nous savons toujours dans quel monde nous résidons. Le récit, écrit de plusieurs points de vue nous offre aussi une vision d’ensemble, globale et par conséquent bien explicite. Chaque personnage vit les choses d’une manière bien propre à sa personnalité et sa vie réelle, et nous donne ainsi accès à des versions quelque peu différentes du cours du rêve. Nous comprenons mieux les enjeux et ruses de chacun, les masques tombent, et nous découvrons les intérêts parfois bien égoïstes de nos adolescents ou adultes. Les protagonistes ne se reconnaissent pas forcément dans l’univers onirique, et certaines des identités mettront un moment pour enfin se dévoiler. La magie du rêve leur offre la possibilité d’être quelqu’un d’autre, de vivre autre chose que leurs banales vie de lycéen et pour certains c’est une chance inespérée. Toutefois, cette méconnaissance des autres et de leurs rôles pourra donner lieu à des situations cocasses ou périlleuses. De quoi pimenter l’histoire et retenir encore plus le lecteur !

Le rêve semble vite devenir un refuge privilégié pour certains élèves qui quittent l’apparente froideur de Prague avec joie. Rejoindre le mystérieux manoir écossais rythme alors leurs journées et chacun compte en profiter. Pour s’y installer un peu plus ou pour déjouer les plans d’une certaine menace. Pourtant, peu d’entre eux auront accès à la vérité et il leur faudra beaucoup de temps pour commencer à comprendre ce qu’il en est. Ici, l’auteure nous entraine sur une piste fascinante que je n’aurais jamais supposée et le roman prend alors une tout autre dimension, que je ne vais pas vous révéler pour ne pas vous gâcher la surprise. Toujours est-il qu’Ena Fitzbel nous prouve son talent sur divers registres littéraires et rien que pour cela Un manoir pour refuge vaut la peine d’être lu. Revenons-en à nos personnages pour qui le manoir incarne une liberté nouvelle et savoureuse. Gardon à l’esprit que les masques vont finir par tomber, créant conflits ou situations embarrassantes qui bien sûr résonneront alors en écho dans leur vie de lycéens. Si la piste exploitée par l’auteure nous parait peut-être un peu loufoque dans un roman déjà très riche, nous comprendrons bien vite qu’elle conserve quelques cartes en mains prêtes à être abattues dans le prochain tome. De surprises en découvertes, de joie en déconvenues, d’amitiés en liaisons dangereuses, nos personnages ne semblent pas vraiment au bout de leurs peines. En tout cas, qui peut nous définir les limites d’un univers onirique ? Attention, le majordome que doit incarner l’auteure dans un château quelque part (pas d’offense, c’est pour le style)  vous apporte une piste sur un plateau d’argent : un énorme clifhanger qui ne peut qu’inciter à lire le second tome. Soyons assurés que la plume saura relever le défi et se faire aussi inventive et addictive.

Enfin, terminons par quelques petits bémols. Si certains personnages sont attachants ou agaçants, d’autres mériteraient plus de profondeur et là, je pense particulièrement à Tif qui, en tant que meilleure amie de notre héroïne, devrait jouir d’un peu plus de traits et histoire. Toutefois, elle semble être dotée d’un caractère assez égoïste et exclusif, peut-être était-il favorable de la laisser de côté pour ce premier tome. De même, le contexte scolaire aurait pu bénéficier d’un peu plus de détails ou situations. Qu’est-ce qui a amené ces élèves-là en particulier dans le cours ? Quid de l’enseignante ? Nous restons encore avec des interrogations et il est difficile de savoir si ce manque de réponses est simplement lié au fait qu’un prochain tome se prépare ou si les réponses sont volontairement esquivées. D’autres questions me taraudent, mais elles, j’en suis certaine, seront élucidées dans l’avenir. Mis à part un léger « manque de travail » (entre guillemets car peut-être est-ce volontaire, j’évoque juste ce qui m’a manqué à moi) sur Tif et aussi sur quelques personnages secondaires, nous pourrions reprocher le virage que prend le livre quand LA révélation survient. Si, une fois la dernière page tournée j’ai pu apprécier ce choix, sur le moment il m’a totalement décontenancée et je me suis dit « non, mais où est-ce qu’on est en train de partir là ? ». La surprise n’est pas une mauvaise chose, comme je l’ai écrit plus haut elle s’est révélée fascinante, innovante et a rendu le reste du roman encore plus addictif, mais la manière dont les éléments sont amenées peut sembler presque trop brutale.

Mention spéciale pour le suspens, l’imaginaire, mais aussi le « patois » belge hilarant d’un des personnages. Le récit est ponctué d’humour et de quelques joutes verbales adolescentes très appréciables, de même que les questions existentielles de cet âge sont posées. Rêve ou réalité, soyez prêts à choisir, car votre décision ne saurait être sans conséquence et toutes les vérités ne sont pas faites pour être entendues…

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Un récit addictif et atypique basé sur un univers onirique parfaitement exploité, c’est ce que nous propose l’auteure d’Un Manoir pour refuge. Alternant les mondes et les personnages, elle nous livre une histoire fascinante qui nous entraine sur des pistes surprenantes. En refermant ce premier tome, nous n’avons qu’une envie, lire la suite. Un peu plus de profondeur sur les (toutefois nombreux) personnages aurait rendu le livre encore plus palpitant. Jolie découverte !MANOTE

16/20

4flamants

 

 

18 réflexions sur “[Chronique] Un manoir pour refuge de Ena Fitzbel

  1. Vampilou fait son Cinéma dit :

    J’avoue que c’est un roman qui m’intrigue énormément, alors autant dire que ton avis me fait d’autant plus envie ma belle ! Il est vrai qu’en plus cette couverture est sublime ❤

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  2. Lupa dit :

    Comme toi, la couverture m’attire irrésistiblement ! Et je vois que tu as fait une jolie mise en scène pour la mettre en valeur sur ta photo, avec un éclairage qui rappelle celle-ci, bravo *_* Le contenu me semble aussi très attirant, c’est pourquoi je place ce titre illico presto dans ma liste d’envies, merci 🙂

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